Je venais de quitter les rives de la Campanie, cette radieuse terre d’Italie, où je filai les semaines les plus magnifiquement insouciantes, peut-être, les plus lumineuses sans doute, de mon existence
Je m’imaginai que si le bonheur avait une patrie, ce serait le séjour de cette région resplendissante, la Grande Grèce, qui fut jadis la villégiature des dieux olympiens, cette conscience onirique de l'homme, dont les temples dressent encore leurs vestiges au-dessus des flots, dans la transparence de l’azur.
Si je devais donner un visage à cette Italie de mes pensées, ce serait volontiers celui de Graziella, décrite dans le roman de Lamartine, d'une pureté primitive et passionnée, sous les pergolas marines, le regard illuminé par la clarté d’un horizon sans attente… Cette terre, cet espace, comme éclaboussés de lumière et d'écume, ont quelque chose d'éternellement suspendu, la pesanteur fascinée du rêve et du destin, l'écoulement d'un sommeil limpide et d'un amour infini.
Ce visage idéal de l’Italie éternelle, de « l’Alma Italia », rayonne en effet de cette douceur sensuelle, de cet esprit d’harmonie de la vie heureuse dont on perçoit la plénitude dans les peintures de Vinci ou de Raphaël. Il respire ce génie de l’existence, qui, par le mélange rayonnant de l’intelligence plastique et de la puissance lyrique, a rendu possible la prodigieuse civilisation de l’art et du plaisir splendidement « superficiel » de la vie.
Nietzsche disait que, comme Ulysse prenant congé de Nausicaa, on ne devrait pas quitter la vie avec regret, mais, au contraire, avec reconnaissance. Il en est de même avec l’Italie, cette épouse et cette mère superbes ; ce sentiment infini de reconnaissance pour la vie qu’elle inspire, laisse en paix avec soi-même et avec le monde.
Honorius/ Les Portes de Janus/1990
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