« HORIZON », c’est le magazine de la la Communauté de l’Ouest Rhodanien (COR), « Au service de ses habitants », présidée par le jovial Michel MERCIER. J’ouvre le numéro 10 du mois de décembre 2019. La mine papelarde et irréprochable du patron figure bien entendu en première page comme il se doit. Belles couleurs, belles photos, graphique dynamique, pour une belle mise en valeur du bilan et des perspectives de la COR, comme tout organe de propagande qui se respecte.
Les thèmes abordés : Les zones d’activités, le soutien aux commerces et aux entreprises, le développement économique, le co-working, le numérique, et bien sûr, la culture et les loisirs. Je note également cette ambition affichée qui devrait me réjouir : « Ce travail sur l’attractivité économique (sic) s’accompagne évidemment (tout est dans le évidemment) d’une ambition d’exemplarité en matière durable ». Tout cela est bel et bien conforme aux compétences de l’institution et l’on se rassure de constater qu’elle agit constamment au service et dans l’intérêt de nos concitoyens. C’est beau comme l’antique.
Je suis peut-être un peu chagrin, nous dirons que c’est sans doute cette fâcheuse habitude que j’ai prise d’observer de manière réaliste mon environnement, qui m’y prédispose, mais mon esprit se rembrunit d’un ton lorsque je lis cette émouvante profession de foi : « Sur un territoire profondément marqué par le retrait de l’industrie textile (les eaux de la Turdine ont dû faire leur deuil de cette couleur bleue provoquée par les rejets), la COR s’applique à mettre en place les conditions d’émergence d’un nouveau tissu industriel ". Et c’est là que ça se corse. Certes le taux de chômage est important dans notre région, l’industrie textile (par nature polluante et maintenant la misère sociale la tête juste au-dessus de l’eau pour ainsi dire), a disparu de nos charmants paysages. Il faut donc se soucier de la revitalisation économique en favorisant l’installation d’entreprises qui créeront beaucoup d’emplois, qu’importe si de nombreux chômeurs n’ont pas de qualification pour les occuper, c’est l’intention qui compte. Pour cela, il faut trouver et offrir du foncier au meilleur prix, surtout reluquer les terres naturelles, toujours plus faciles et moins coûteuses à investir que les friches industrielles à assainir et reconvertir.
Mon esprit se rembrunit d’un deuxième ton lorsque je lis à la suite : « Développement économique : ID Logistics prend des engagements : 504, c’est le nombre d’emplois qui seront créés par ID Logistics à Saint Romain de Popey ». Avec cette précision « 50 % des poids lourds (des centaines qui desserviront les plates-formes) seront équipés de la technologie GNV ». On est priés d’applaudir.
Devant ce raz-de-marée proclamé de croissance et d’agitation productiviste, un malaise me saisit, je pressens comme un Tohu-Bohu de fin du monde.
Mais d’abord, où sont-ils allés chercher un tel chiffre de 504 emplois ? Diverses explications ont par ailleurs été fournies par extrapolations statistiques à vrai dire peu convaincantes. Mais c’est sans doute cela la force des grands visionnaires, savoir ce que tout le monde ignore et le proclamer bien haut.
J’avais cru au début faire un cauchemar, mais non, la triste réalité me rattrape. Nous y revoilà bien, la lubie est tenace, il y tient le CORiste en chef, comme le bourgeois aux macarons de sa poterne : Voilà qu’en guise de message chaleureux de Noël, je vois encore s’animer le spectre de cette monstruosité annoncée et dont notre président est si fier et si trépignant d’impatience, le projet rafraîchissant porté par la non moins rafraîchissante SMADEOR de bétonner dans l’allégresse, dans l’ivresse des promesses d’avenir enchanté, des dizaines d’hectares de bonne terre naturelle et agricole aux confins de Saint Romain de Popey, Sarcey et les Olmes (voir par ailleurs SMADEOR, Syndicat Mixte d’études d’aménagement et de développement économique de l’Ouest rhodanien, promoteur du projet). Le principe de l’affichage est simple, c’est une affaire de conditionnement et d’emballage : Je détruis 50 hectares de nature, t’occupe, car c’est bon pour l’économie, mais sois tranquille, en contrepartie j’ai le souci du développement durable, car je participe au financement (c'est l'information donnée par l'article) de la rénovation de bâtiments et d’équipements photovoltaïques sans oublier les unités de méthanisation (dont on connaît aujourd’hui les risques et les limites). Et en prime je maintiens des corridors verts (zones naturelles, qui sont dans le cas d’espèce apparemment des talvegs. Ce n’est pourtant pas une grande concession car ces zones constituent une contrepartie obligatoire de l’emprise du projet au titre de la loi sur la compensation. Cette question de la compensation, qui est en soi une vraie fumisterie, sent à plein nez l’entourloupe dans le projet de la Smadeor ; voyez l’article du « Canard Enchaîné » plus bas). On admire l’art du boniment. Est-t-on pour autant rassuré ?
Devant la levée de boucliers de la population riveraine qui n’est pas dupe des conséquences catastrophiques sur l’environnement, de la dégradation prévisible des conditions de son existence déjà bien entamées depuis l’implantation de l’autoroute A89, les manitous du projet, Michel Mercier en tête, fortement chahutés lors d’une réunion publique en juillet 2019 où ils révélèrent toute l’étendue de leurs carences cognitives et surtout toute leur indifférence sur les questions de santé et d’environnement, acculés, confondus, dégainèrent l’argument imparable : Certes (en substance), nous n’avons pas pris en compte les questions de sécurité et de santé publiques liées à l’intensification de la circulation et de la pollution, reconnaissent-ils de manière qui pourrait être qualifiée de coupable, mais nous demandons que soient présentés par les futures entreprises un plan de transport et aux organismes compétents un diagnostic sur la qualité de l’air etc. Voilà une belle démonstration du grand art hypocrite et de mauvaise foi de l’enfumage ! Avec cette particularité supplémentaire de mettre les bœufs après la charrue. Mais qu’importe, il fallait quand même penser à cette répartie géniale, le truc qui change tout, et qui prétend mettre un terme aux débats.
Alors, SMADEOR, EN COR ?
24 décembre 2019
Extrait de l’article paru dans le « Canard Enchaîné » le 17 juillet 2019, sous la plume du « Professeur Canardeau », intitulé : « Compenser, c’est pas ça » :
« Stop à l’artificialisation des terres ! Le Gouvernement l’a promis à l’issue du premier Conseil de défense écologique (le 23 mai) : 60 000 hectares bétonnés chaque année, ça suffit. Sauf qu’on pourra continuer à bétonner grâce à la com-pen-sa-tion. Héritage du Grenelle de l’environnement et obligation réglementaire depuis 2016, ce savant mécanisme oblige les aménageurs qui détruisent des espaces verts à acheter en contrepartie des « actifs naturels ». Ainsi, si un promoteur comble une mare où barbote la grenouille agile, espèce protégée, il devra acheter un terrain gorgé d’eau jusqu’à deux fois et demie plus grand et le « renaturaliser » (sic). Et hop ! Voilà comment on obtient le « zéro artificialisation nette ». Reste une question : cette nouvelle mare vertueuse et grouillante de biodiversité est-elle à jamais sanctuarisée ? Prenons deux exemples : (Je citerai seulement le premier qui nous concerne/ Note Blogger)
Près de Lyon, entre Tarare et L’Arbresle, les élus locaux ont autorisé le bétonnage de 47,50 hectares de terres agricoles le long de l’A89, afin d’y bâtir moult hangars et grandes surfaces. Or, sur ce territoire, se trouvent une haie et deux mares censées être protégées puisqu'elles compensent les dégâts occasionnés en 2013 par ASF, une filiale de Vinci, lors de la construction de cette même A89. Harold Levrel, économiste à AgroParisTech, est formel : « Dans la loi de 2016, il est clairement mentionné que les mesures compensatoires doivent durer aussi longtemps que l’impact. Il s’agit ici d’un cas de délit environnemental flagrant ! ». En septembre dernier (2018), l’Autorité environnementale a beau avoir émis un avis négatif sur ce projet, l’opération suit son cours ».
En effet, il ne manquerait plus que ça, empêcher toute la fine équipe des grands décideurs de bétonner en rond !
Voir SMADEOR, J'ABHORRE
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